différents types de décantation

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Divers types de matières décantables sont à distinguer :

  • les particules grenues décantent indépendamment les unes des autres avec chacune une vitesse de chute constante ;
  • les particules plus ou moins floculées ont des tailles et donc des vitesses de décantation variables. Lors­que leur concentration est faible, la vitesse de chute augmente au fur et à mesure que les dimensions du floc s’accroissent par suite de rencontres avec d’autres particules, c’est la décantation diffuse.

Pour des concentrations plus élevées, l’abondance des flocs et leurs interactions créent une décantation d’ensemble, le plus souvent caractérisée par une interface nettement marquée entre la masse boueuse et le liquide surnageant : c’est la décantation en piston, dont la vitesse est optimale dans une certaine zone de concentrations, au-dessus de laquelle on parle de décantation freinée.

décantation des particules grenues

C’est le cas le plus simple, le seul facilement décrit par des équations.

théorie : fluide au repos

Lorsqu’une particule grenue est laissée dans un liquide au repos, elle est soumise à une force motrice FM (pesanteur diminuée de la poussée d’Archimède) et à une force résistante FT (traînée du fluide) résultante des forces de viscosité et d’inertie :

Formule : Théorie fluide au repos

régime hydraulique

La valeur de C, coefficient de traînée, est définie par la perturbation, elle-même fonction de la vitesse de chute. Cette perturbation est caractérisée par le nombre de Reynolds de grain défini par :

Formule : Théorie fluide au repos - décantation à vitesse constante

Re = adimensionnel,
avec μ = viscosité dynamique.

Si Re est petit, les forces de viscosité sont bien supérieures aux forces d’inertie. Si Re est grand, les forces de viscosité sont négligeables.

Le coefficient de traînée est donné par :

Formule : Régime hydraulique - Reynolds de grain

Le tableau 9 donne les différentes valeurs de a, n et C en fonction du nombre de Reynolds.

Ces formules sont à la base du calcul du mouvement des grains dans un fluide et sont utilisées en décan­tation (solides grenus dans un liquide, gouttes d’eau dans l’air), en ascension (bulles d’air dans l’eau, gouttes d’huile dans l’eau), en centrifugation, en fluidisation.

En régime laminaire, la loi de Stokes pour une particule sphérique donne :

Formule : loi Stokes

Les phénomènes d’agrégation faisant croître d font donc très rapidement croître la vitesse de décantation.

En régime transitoire, la loi de Allen donne également une vitesse croissante en fonction de la taille de la particule mais beaucoup moins rapidement puisque :

Formule :  loi Allen

facteur de sphéricité

Ce facteur Ψ est donné par :

Formule : facteur de sphéricité

Dans les opérations précédentes, il faut alors remplacer C par C' = ΨC et la loi de Stokes s’écrit

Formule : facteur de sphéricité - loi Stokes

et le tableau 10 montre l’influence considérable de ce facteur pour les matériaux « plats ».

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Tableau 10. Influence du facteur shéricité pour les matériaux "plats"

conditions de capture

Si l’on considère un décanteur rectangulaire de longueur L, de section verticale S = H·ℓ (où H est la hau­teur de l’eau et ℓla largeur) et de section horizontale SH = L· ℓ, traversé uniformément par un débit Q, soit dans le sens vertical ascendant, soit dans le sens horizontal, les conditions pour qu’il retienne une particule grenue décantant à la vitesse Vo dans une eau immobile seront les suivantes :

décantation à flux vertical

Les particules dont la vitesse de sédimentation est supérieure à la vitesse ascendante du liquide sont rete­nues, ce qui s’écrit :

Formule : décantation à flux vertical

Q = débit du liquide,
SH = surface libre du décanteur.

décantation à flux horizontal (figure 11)

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Figure 11. Schéma de la décantation à flux horizontal (particules grenues)

La vitesse d’une particule entrant dans le bassin à son niveau supérieur a deux composantes :

V1 : vitesse horizontale du fluide égale à Q/S,
V0 : vitesse verticale de chute donnée par la loi de Stokes.

Formule : Décantation à flux horizontal

VH : vitesse de Hazen (ou charge hydraulique superficielle) analogue à Vasc du cas précédent et exprimée en m3 · (h·m2)–1 ou m · h–1.

Il est à noter que VH est indépendante de la profondeur du bassin.

Toutes les particules ayant des vitesses de sédimentation supérieures à VH seront théoriquement élimi­nées. Toutefois, si l’alimentation en eau est répartie sur toute sa hauteur, une partie des particules ayant une vitesse de décantation V inférieure à la vitesse de Hazen sera aussi retenue dans le rapport V/VH, alors que dans un décanteur à flux vertical, ces particules ne seraient pas retenues.

Théoriquement, à surface horizontale égale, un décanteur à flux horizontal permet donc la séparation d’un plus grand nombre de particules (figure 12).

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Figure 12. Efficacité comparée de décantations horizontale et verticale (particules grenues)

Dans la pratique, cette différence est atténuée, voire inversée, pour les raisons suivantes liées à la décan­tation à flux horizontal :

  • difficulté de répartition hydraulique sur un plan vertical aussi bien à l’entrée qu’à la sortie de l’ouvrage ;
  • accumulation et collecte des boues, qui réduit la section disponible ;
  • dans un décanteur circulaire à flux horizontal, la composante horizontale de la vitesse de la particule (V1) diminue du centre vers la périphérie et sa trajectoire devient curviligne

décantation diffuse des particules floculées

Lors de la décantation, la floculation se poursuit et la vitesse de sédimentation des particules Vo augmente (figure 13).

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Figure 13. Schéma de la décantation à flux horizontal (particulesfloculées)

Ce processus se produit dès que la concentration en matières floculées est supérieure à environ 50 mg · L-1.

L’efficacité de la décantation diffuse est liée non seulement à la charge hydraulique superficielle, mais aussi au temps de séjour. Il n’existe pas de formule mathématique permettant le calcul de la vitesse de décantation.

Des essais de laboratoire et des méthodes graphiques permettent seuls de connaître cette vitesse. La figure 14 donne les résultats d’un tel essai.

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Figure 14. Elimination des particules floculées en décantation diffuse : relation entre temps, la hauteur effective et le rendement de décantation

décantation en piston des particules floculées

Quand la concentration en particules floculées augmente, les interactions entre particules ne sont plus négligeables, elles décantent en « piston ». La floculation et la décantation peuvent s’en trouver d’abord améliorées (voir décantation à contact de boue) puis freinées au-delà d’une certaine concentration critique, on parle alors d’une « décantation freinée ».

Ce phénomène est caractéristique des boues activées et des suspensions floculées quand leur concentra­tion est supérieure à environ 500 mg · L–1.

observation visuelle

Quand on réalise une décantation en piston dans un tube de hauteur et de diamètre suffisants (au mini­mum une éprouvette d’un litre), on observe généralement l’apparition de quatre zones (figure 15).

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Figure 15. Décantation en piston : courbe de Kynch

À partir d’un certain état, les zones b et c disparaissent, c’est le point critique. L’évolution de la hauteur de l’interface a-b en fonction du temps, constitue la courbe de Kynch.

courbe de Kynch (figure 16)

L’hypothèse fondamentale de Kynch est que la vitesse de chute d’une particule ne dépend que de la con­centration locale C en particules.

De A à B, la surface de séparation est plus ou moins nette : c’est la phase de coalescence des flocons. Cette phase est parfois inexistante.

De B à C, une partie rectiligne traduit une vitesse de chute constante V(pente de la droite). Vest fonction, pour un tube de dimensions données, de la concentration initiale en MES et des caractéristiques de flocula­tion de la suspension. Lorsque, la concentration initiale Caugmente, la vitesse de décantation Vde la masse diminue : par exemple, pour une boue activée urbaine dont la concentration en MES passe de 1 à 4 g · L–1, Vdécroît de 6 à 1,8 m · h–1.

Le tronçon CD, concave vers le haut, correspond à un ralentissement progressif de la vitesse de chute de la couche supérieure du dépôt.

À partir de D, les flocons se touchent en exerçant une compression sur les couches inférieures.

La théorie de Kynch s’applique aux tronçons BC et CD qui couvrent le domaine essentiel de la décantation des boues floculées.

interprétation

Si l’on considère une suspension dont la décantation ne comporte pas de phase de coalescence (figure 17), le calcul montre que :

  • dans le triangle BOC, la concentration et la vitesse de chute sont constantes et égales aux valeurs initia­les régnant en B ;
  • dans le triangle COD, les courbes d’équiconcentration sont des droites passant par l’origine, ce qui signi­fie que, dès les premiers moments de la décantation, les couches les plus voisines du fond sont amenées à passer par toutes les concentrations comprises entre la concentration initiale et celle correspondant au point D, début de la compression.

Le milieu boueux de hauteur eb à l’instant t1 présente donc trois zones distinctes :

  • une zone supérieure bc où la concentration et la vitesse de chute sont uniformes et ont gardé leurs valeurs initiales C et V0 ;
  • une zone intermédiaire cd dans laquelle la concentration augmente progressivement de c en d et la vitesse de chute diminue en conséquence ;
  • une zone inférieure de où les flocons de boues sont soumis à la compression.

Dans le milieu considéré au temps t2 la zone supérieure disparaît, et au temps t4 la zone inférieure seule subsiste.

Pour le point M de la partie CD, deux concentrations peuvent être définies :

CMi concentration à l’interface,
CM concentration moyenne.

D’après l’hypothèse de Kynch :

Formule : Hypothèse de Kynch concentration à l'interface

Par ailleurs :

Formule : Hypothèse de Kynch concentration moyenne

Les trois parties BC, CD et DE de la courbe de Kynch (figure 16) trouvent leur application dans le calcul des ouvrages en sédimentation freinée. La phase BC correspond au domaine des décanteurs à contact de boue. La phase CD est relative aux ouvrages dans lesquels une concentration de la boue est recherchée (appareils à recirculation de boues épaissies). La phase DE est exploitée pour l’épaississement de boues.

indices de mohlman (sludge volume index : SVI)

Un point particulier est considéré sur la courbe de Kynch, celui d’abscisse 30 minutes : l’indice de Mohl­man IM est très utilisé pour caractériser la décantabilité des boues biologiques et donc pour le dimension­nement de leur clarificateur, voire le déclenchement de méthodes correctives si un foisonnement se développe, (voir biomasse épuratrice des eaux résiduaires et procédés biologiques).

Formule : Indice Mohlman

V : volume de boue après 30 min de décantation (cm3),
M : MES présentes dans ce volume (g).

L’inconvénient de l’indice de Mohlman est qu’il dépend très nettement de la concentration initiale de la boue. Aussi, il a été proposé des méthodes permettant de définir un indice indépendant de cette concentra­tion, et donc caractéristique seulement de l’état de la boue de la station. Il s’agit de :

indice de boue (IB) ou indice de mohlman dilué (DSVI).

La courbe de Kynch est déterminée après des dilutions permettant de retrouver un volume de boue, après 30 min de décantation, au voisinage de 200-250 mL par L. L’indice de boue IB employé en France est valable si ce volume se situe entre 100 et 300 mL, le DSVI employé par les Anglo-Saxons s’il est compris entre 150 et 250 mL. Dans les deux cas on peut dire qu’une boue activée possède une très bonne décantabilité lorsque son indice de boue ou son DSVI est compris entre 50 et 100 cm3·g–1, une décantabilité normale entre 100 et 200, une mauvaise décantabilité au-dessus de 250.

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